Par chat

Chattez avec
Drogues Info Service

Par téléphone

Drogues Info Service répond
à vos appels 7 jours sur 7

Contactez-nous

Adresses utiles

Forums pour l'entourage Télécharger en pdf Imprimer Envoyer à un ami

Impuissante face à la toxicomanie de mon frère

Par Profil supprimé

Bonjour,
J'ai 27 ans, je suis infirmière.Cela fait maintenant à peu près 5 ans que mon frère, Antoine (22 ans), sombre peu à peu dans la spirale de la drogue.
Au début, il ne s'agissait "que" de cannabis. C'était un garçon drôle, qui avait une vie sociale épanouie. Nous étions très proches et complices.
Un évènement est venu bouleverser nos vies. Antoine et des amis ont été victimes d'un grave accident de la route. Un de ses amis, Benjamin, n'a pas survécu à ses blessures. Antoine, lui, fut grièvement blessé et opéré d'urgence. Depuis ce jour, il n'a plus jamais été le même.
Au départ, on pense que c'est à cause du choc lié à l'accident. Et puis petit à petit, Antoine s'est replié sur lui-même. Il s'est coupé de ses amis, de sa famille, de moi... Il s'est mis à avoir de mauvaises fréquentations, a changé de look vestimentaire,etc... Et c'est là que tu comprends peu à peu la gravité de la situation.
Bref, je passe les détails, car je pourrais en écrire tout un livre...
Le but de mon témoignage, est de vous faire part de ma profonde souffrance, face à mon impuissance. 1000 fois j'ai voulu le sauver, j'ai tout essayé, sans succès... Parfois, il semble aller mieux, alors l'espoir revient. Mais, ça ne dure jamais longtemps...
J'ai si mal...Ma famille et moi ne savons plus comment faire, et je crains tellement que tout ça finisse tragiquement...
J'ai besoin d'aide s'il vous plait, je suis prête à tout pour l'aider, seulement je suis à bout de souffle, et je n'ai certainement pas les bonnes armes pour faire face à ça.
Son enfer est devenu le nôtre...
Merci d'avance pour vos réponses.

Fil précédent Fil suivant

6 réponses


Profil supprimé - 06/03/2013 à 11h04

Bonjour Pauline,

Je suis le modérateur, je me suis permis de déplacer votre message dans ce forum parce que dans les Témoignages vous n'auriez pas pu recevoir de réponse.

Qu'est-ce qui a été tenté du côté de la prise en charge du traumatisme et de la culpabilité de votre frère ? Avez-vous vous-même pu vous renseigner sur les traumatismes et leur prise en charge ? Il existe par exemple un livre (parmi d'autres), "l'Ecoute des blessures invisibles" (Michèle Vitry, Ed.l'Harmattan, 2002), qui parle de l'écoute des personnes ayant vécu un traumatisme. Ce type de lecture pourrait vous permettre d'acquérir une compréhension supplémentaire de ce que peut vivre votre frère. Cela pourrait vous donner des pistes quant au comportement à adopter avec lui. Une technique thérapeutique, l'EMDR semblerait utile dans ce genre de situation. Vous trouverez des renseignements sur Internet.

Par ailleurs quelles drogues prend votre frère ? Je n'ai pas l'impression que la drogue soit le centre du problème mais qu'elle est plutôt son symptôme. Cependant puisqu'il en prend c'est à prendre en compte. Avoir des informations là-dessus permettrait d'affiner notre compréhension de sa situation.

Cordialement,

le modérateur.

Profil supprimé - 06/03/2013 à 20h58

Bonjour,
Merci pour votre réponse.
Concernant la prise en charge du traumatisme, mon frère a toujours refusé de rencontrer un psychologue. Habitant à Amiens, je me suis rendue au Mail, établissement qui prend en charge les toxicomanes et leur entourage. J'y ai rencontré un psychologue, qui, à mon sens, ne m'a pas réellement écoutée et n'a pas su me guider. Je me suis également rendue aux urgences psychiatriques (un soir en larmes, suite à un appel téléphonique d'Antoine, qui me disait être au plus mal), afin de savoir quelles étaient les alternatives possibles. Une infirmière m'a reçue, m'expliquant que s'il ne présentait pas d'idées suicidaires, et ne tenait pas de discours incohérent, on ne pouvait rien faire pour lui.
Le problème, c'est qu'il refuse toutes les options proposées (cures, hospitalisation, éloignement géographique afin de s'écarter du contexte, psychologues,etc...).
Concernant sa consommation, ce que je sais, c'est qu'il fume quotidiennement et en forte quantité du cannabis. Les drogues dures sont ingérées, il y a de la cocaïne, du "speed" et d'autres choses encore dont je ne me souviens plus le nom. Mes sources, je les tiens d'Antoine lui même, qui, un jour où il avait besoin de se confier (c'est TRES rare!), m'a énoncé les produits.
Il oscille sans arrêt entre l'envie de s'en sortir et les rechutes. Le problème, c'est qu'il ne se donne pas les moyens de s'en sortir. En ce moment par exemple, je sais qu'il prend de la méthadone, achetée "sous le manteau", pensant se sevrer tout seul... J'ai tenté de lui expliquer qu'il n'y parviendrait pas tout seul, mais il ne veut rien entendre.
J'espère trouver des clefs avec votre aide...Merci d'avance.

Profil supprimé - 07/03/2013 à 13h31

Bonjour Pauline,

Merci pour vos précisions qui éclairent bien la situation je pense. Ce que je note c'est que votre frère essaye tout de même des choses pour s'en sortir, même si c'est désorganisé, sans aide et que cela n'aboutit pas. Cela signifie au moins que son désir le plus profond n'est pas de se défoncer ou de se détruire complètement.

Je reviens sur le thème du traumatisme qu'a vécu votre frère. Si vous arrivez à mettre la main sur le livre dont je vous ai parlé la dernière fois, vous comprendrez que les personnes qui, comme lui, ont subi un accident brutal dont elles se sont sorties mais qui aurait pu les faire mourir, ont l'impression qu'elles ont vécu une expérience unique, que personne ne peut comprendre. C'est comme si, tout d'un coup, il y avait un mur entre elles et les autres. Et l'une des conséquences de cela et qu'elles s'enferment sur elles-mêmes et s'isolent.

Et effectivement personne ne peut être à leur place et elles ont vécu une expérience unique. En revanche on peut, si on a la capacité ou la compétence pour le faire, se mettre à leur service pour écouter ce qu'elles ont à dire et essayer de l'entendre. Il faut pouvoir accueillir "l'inimaginable", l'effroi et la culpabilité qu'elles éprouvent (à s'en être sorti, à être désormais "différent"blunk, sans jugement mais avec bienveillance et empathie.

Vous êtes infirmière, peut-être avez-vous eu l'occasion d'avoir des formations à l'écoute empathique ? Peut-être votre lieu de travail peut vous former à cela ?

J'ai l'impression en tout cas qu'avant de pouvoir en passer par une aide structurée pour se sortir de la drogue, votre frère a besoin d'un préalable, celui d'être entendu, accueilli dans sa souffrance. Il ne s'agit pas forcément d'aller voir un "psy" - là où il en est aujourd'hui cela semble être un trop gros mot pour lui - mais de faire en sorte que quelqu'un autour de lui, sans doute vous, arrive à se mettre suffisamment à sa disposition pour qu'il lâche quelque chose de ce qu'il vit. En comprenant et en "ressentant" même qu'elles peuvent être réellement entendues, les personnes qui ont vécu un traumatisme peuvent renouer des fils autour d'elles et remonter progressivement la pente. Cela prend du temps et c'est difficile mais la résilience est possible. Votre frère a la chance de vous avoir à ses côtés. Cela n'est peut-être pas forcément suffisant pour qu'il s'en sorte - et il ne faut pas que vous-même vous mettiez à porter la "responsabilité" de son éventuelle guérison - mais c'est réellement un atout. Essayez non seulement d'écouter mais aussi "d'entendre" votre frère lorsque l'opportunité de se confier se présentera de nouveau pour lui. Dans un premier temps ne vous focalisez pas sur l'aide à lui apporter mais sur l'accueil de sa souffrance et sur le renforcement des liens avec lui.

En tout cas je n'ai pas l'impression que votre frère soit dans une démarche d'auto-destruction totale. J'ai plus le sentiment que son mal-être se situe du côté de sa rupture au réel, au monde, qui fait qu'il ne sait plus trop où il habite, qui il est et quel sens tout cela peut avoir.

Cordialement,

le modérateur.

Profil supprimé - 07/03/2013 à 18h56

Bonjour,
Je vous remercie une fois de plus.
Depuis à peu près 6 mois, je suis davantage dans l'écoute et l'empathie. Auparavant, l'approche que j'avais vis à vis de lui était trop agressive, et je ne m'en rendais pas compte... J'étais tellement bouleversée et en colère...Je lui faisais beaucoup de reproches, et forcément lui se sentait jugé. C'est pour ça qu'il coupait régulièrement les ponts avec moi, pendant des périodes assez longues. C'est une amie qui m'a ouvert les yeux sur mon comportement.
J'ai conscience que le réel malaise chez lui concerne cet accident, je sais qu'il culpabilise et se sent responsable de la mort de son ami (il l'a verbalisé une fois il y a très longtemps auprès de notre mère). C'est un sujet tellement douloureux et délicat, que je ne lui en parle jamais, par peur de le braquer (il se braque très facilement...).
Tout ce qu'il me reste à faire aujourd'hui, est d'être présente pour lui, j'essaye quand même de ne pas le "harceler", sinon il se sent oppressé... Mais je lui fait régulièrement comprendre que je l'aime et qu'il peut compter sur moi.
Mon métier m'amène effectivement à observer,écouter,et parfois guider les gens. J'apporte un certain réconfort, parfois une aide aux autres (les patients le verbalisent souvent). Et pourtant, j'ai la sensation d'être inutile pour Antoine... J'ai une frustration et une tristesse immense face à ça.

Je vais me procurer l'ouvrage dont vous me parlez.
Sachez que ce que vous me dites m'apporte beaucoup...Au moment où je vous écrit, je lui ai envoyé ce texto "Je pense fort à toi mon frangin!", et lui m'a répondu "moi aussi t'inquiète!".
Tout ça pour vous dire, qu'auparavant, lorsque j'étais trop dans le jugement et l'agressivité, il ne répondait jamais à mes messages, appels ou autres... Cela prouve que votre méthode, fondée sur l'écoute et l'empathie (pour laquelle j'ai opté depuis peu), est plus efficace et constructive.
Cordialement.

Profil supprimé - 07/03/2013 à 19h13

Bonsoir,

Je suis tout à fait heureux de lire ce que vous avez écrit.

Votre première réaction avec votre frère a été tout à fait normale parce que vous étiez touchée intimement par son histoire. Ce qui est tout à fait positif c'est que malgré cela vous avez pu en prendre conscience et que vous avez pris du recul. Vous avez vous-même progressé dans votre démarche, le lien est là, qui existe et se renforce peut-être avec votre frère. Il a de la chance de vous avoir !

Sa douleur et sa culpabilité doivent être immenses. Il faut qu'il puisse un jour se pardonner à lui même et accepter cette fatalité.

Vous voyez, vous êtes venue dans ces forums en ne sachant plus que faire et en demandant de l'aide mais en fait vous aviez déjà entrepris de belles choses ! Faites-vous confiance mais si c'est trop difficile parfois, parlez-en autour de vous happy

Bon courage et bonne continuation.

Cordialement,

le modérateur.

bluenaranja - 03/04/2013 à 22h12

Il y a aussi eu récemment sur Arte ou la Cinq des émissions sur certains médicaments qui aident à briser le cycle du post trauma, bêta bloquants et un autre dont je ne me rappelle plus le nom. Encore en cours d'études mais montrant des résultats étonnants, comme l'emdr d'ailleurs, quand elle est faite par des pros. J'ai vu aussi que la morphine pouvait avoir cette effet, j'en parle car c'est justement le produit que j'ai pris pendant longtemps, suite à plusieurs trauma importants - enfance très difficile suive de viol-séquestration-menaces de mort. Quelque part l'histoire de votre frère me rappelle la mienne. A 17 ans, j'ai cru mourir, à un moment j'ai vécu une sorte de disociation puis l'horreur était telle que j'ai accepté l'idée de la mort. Et finalement, putain d'instinct de survie, je m'en suis sortie. Je ne me sentais vivante qu'en étant en danger de mort, et me shooter me permettait de contrôler ma vie en flirtant avec la mort, de mettre pause sur ma douleur.
Pour que votre frère arrive à trouver un sens à sa vie, il faut traiter son problème de post trauma qui semble évident dans ce que vous racontez. J'ai lutté des années, en menant une thérapie en parallèle de séjours en hp, et ce qui m'a finalement sauvé la vie, ce qui m'a littéralement permis de renaître à moi-même, c'est d'avoir un enfant, mais j'avais déjà six ans de thérapie derrière. A raison d'une séance par semaine.

bon courage
blue

Répondre au fil Retour