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Fuir de tout un "milieu" pour s'en sortir

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Il est difficile pour moi de reparler de cette période de ma vie mais je crois que j'ai encore besoin d'en parler et si mon témoignage peut faire écho chez quelqu'un qui est en souffrance et peut l'aider, alors ça en vaut la peine.

Dans mon histoire, avant la consommation de drogues, il y a surtout un milieu que j'ai commencé à fréquenter.

Un milieu "d'artistes" qui m'avait toujours attiré pour leur nonchalance et leur "marginalité" (aujourd'hui je me dis qu'ils étaient plus paumés et prêts à tout pour se démarquer des autres que "marginaux" au sens propre, finalement).
J'avais environ 18 ans et j'étais en totale admiration devant eux, je voulais absolument en faire partie et j'ai commencé à sortir tous les soirs ou presque pour m'insérer dans ce monde qui me fascinait. C'était une ville moyenne, assez grande pour que leur réseau soit vaste et assez petite pour y retrouver les mêmes têtes dans les lieux à la mode.
Pendant environ 3 ans, je me suis donc fondue sans problème dans ce fameux réseau, au début ça n'était que le weekend et tous les soirs des vacances puis j'ai arrêté mes études, je ne vivais que la nuit et buvais énormément (une nuit normale je buvais environ 3 bières pour commencer puis 1 ou 2 bouteilles de vin entières puis des gorgées à droite à gauche dans les bouteilles des uns et des autres).
Je ne mangeais plus beaucoup puisque je n'avais plus d'argent pour la nourriture. La gueule de bois était devenue mon état normal, j'étais irritable et fatiguée.
Je vivais toujours chez mes parents mais je n'y rentrais que deux à trois fois par semaine maximum, le reste du temps je squattais chez des potes ou je m'endormais dans des genres de squat ou chez des gens qui faisaient des afters chez eux.
Mes parents s'inquiétaient de voir ma tête de zombie 2 fois par semaine, puant l'alcool et irritable mais je les rassurais en leur disant que je ne buvais pas tant que ça et que j'étais quelqu'un qui avait besoin d'une vie sociale riche (ils n'étaient pas vraiment dupes mais ne savaient pas comment m'aider).
Je crois qu'inconsciemment j'avais une barrière mentale qui me faisait craindre de prendre des drogues, ce qui m'importait le plus, c'était de me désinhiber et vu la quantité d'alcool que je prenais, cela me "suffisait" à me désinhiber (je me rappelais rarement de la fin de ma soirée de la veille), la drogue me semblait être ma "limite", et ce qui me bloquait le plus pour en prendre était d'ailleurs son prix.

Un jour, un "pote" m'a offert de la MDMA, je savais que c'était une drogue hyper répandue autour de moi, assez banale et inoffensive (de ce qu'on m'en disait) alors j'ai accepté. Je crois que c'est ce moment qui est le plus important dans ma descente aux enfers, c'est à ce moment précis que je me suis dit "tiens mais oui allez, je vais tenter les drogues", curieusement, comme si je n'y avais jamais pensé avant pour moi, alors que j'en étais entourée.

J'ai passé une soirée géniale, j'ai dansé toute la nuit, je me sentais hyper désirable, en osmose avec tout le monde, j'avais la sensation que nous vivions une période de notre vie exceptionnelle.

Évidemment dès le lendemain j'ai voulu en reprendre, et ça a duré environ 5 ou 6 mois comme ça, j'alternais entre cocaïne, MDMA et speed. Je me souviens que rapidement, j'étais quand même prise de culpabilité le lendemain, J'avais un peu la sensation de "me pourrir" et je culpabilisais pour mes parents (je ne savais pas pourquoi) mais tous mes potes consommaient autant voire plus que moi, on en riait le lendemain (je vivais en colocation avec eux), on prévoyait notre conso pour la soirée à venir ensemble, on prévoyait nos teufs, les DJ qui mixaient aux grosses soirées étaient toujours des potes, impossible de rater ça, et encore moins de ne pas être "high" pendant le set. Il était de plus en plus difficile d'attendre le soir pour consommer, parfois on consommait non stop pendant 72h, sans dormir, et tout le monde trouvait ça normal. Plus nos réactions aux drogues étaient fortes, plus ça nous amusait. En quelques sortes, les personnes faisant les trucs les plus cons, les plus humiliants quand elles étaient défoncées devenaient les plus "drôles" dans le cercle.
Et le plus traitre dans tout ça, c'est que, en quelque sorte, nous étions vrais. On imagine toujours les milieux de drogués comme des milieux glauquissimes, plein de gens dénués de toute personnalité, de toute réflexion. Et pourtant autour de moi (et il n'y avait pas que des consommateurs d'amphet', certains prenaient de l'héro et beaucoup de la méthadone) les gens paraissaient vifs, drôles. Je pensais que nous n'étions qu'une bande un peu originale de joyeux fêtards qui vivions notre vingtaine a fond. Même si mes descentes devenaient de plus en plus dures à vivre, j'avais toujours une culpabilité qui me rongeait, en particulier vis a vis de ma famille.

Un jour de mes 21 ans, c'était la fin d'une nuit, j'étais perchée à la MDMA depuis 8 ou 9 heures, j'étais terrifiée à l'idée de descendre, je voulais rester perchée à tout prix. Il ne restait pas grand monde sur le lieu de la "fête", mes amis proches étaient rentrés dormir, il ne restait que des personnes défoncées, le jour se levait. J'ai réussi à trouver un dealer douteux qui trainait et qui avait de la kétamine, je n'en n'avais jamais pris mais j'étais obsédée à l'idée de rester perchée. J'en ai pris une trace. J'ai fini la soirée à peine plus high qu'avant de la prendre, j'ai fini par avoir envie de rentrer, ma sœur passait dans le coin et m'a ramené chez mes parents.
Je parlais fort, j'ai mangé un peu en rentrant et suis tombée de fatigue.

En me réveillant, vers le milieu d'après midi, j'ai vécu le pire moment de ma vie.

Je ne reconnaissais plus rien, j'avais une sensation d'irréalité, la culpabilité me rongeait les entrailles, j'avais la sensation qu'il était trop tard, que je m'étais pourris, que rien ne serait plus comme avant, que j'allais mourir, que ma famille allait mourir à cause de moi. Que je ne pourrai plus jamais être heureuse, que rien ne me serait plus jamais familier. Je voulais remonter le temps, me réveiller de ce cauchemar, ça a duré au plus haut point pendant environ 5 heures. J'ai réussi à me calmer un peu par la suite, et le lendemain, ça a repris. Et ce régulièrement pendant des semaines.

Aujourd'hui, je n'ai plus repris la moindre drogue, mais ça a été très dur, il a fallu que j'accepte que ce que je vivais depuis des années était une vraie vie de merde complètement déconnectée de la réalité. J'ai eu l'impression de me réveiller d'un sommeil de plusieurs années, de redécouvrir la vraie vie.
J'ai eu beaucoup de chance d'avoir une famille présente et aimante, et d'autres amis extérieur au cercle dans lequel je trainais qui m'ont beaucoup aidé sans s'en apercevoir. Mais j'ai fait le travail seule, j'ai quitté la colocation, je me suis éloignée de tout le monde alors qu'ils me sollicitaient en permanence et trouvaient que j'exagérais.

Aujourd'hui, j'ai 24 ans et je ressens encore le besoin d'en parler parfois, j'ai accepté que cette période fasse partie de moi mais ça a été très dur. J'ai changé totalement d'amis, je me suis trouvée des passions, et j'ai un rythme de vie très sain.
Par contre j'ai toujours la crainte de croiser qui que ce soit qui me rappelle cette période de ma vie, j'avais besoin d'une coupure nette et total. Et lorsqu'il m'arrive de boire trop pour une occasion, je supporte très mal la gueule de bois le lendemain qui me rappelle mes bads et me donne l'impression de devenir folle, c'est le plus dur à gérer. J'ai aussi développé des angoisses nocturnes et je me demande si je n'ai pas frôlé des épisodes à tendance schizophrène, je panique aussi lorsque je suis seule et que je sens une pointe d'ennui monter, j'ai aussi tendance à me crisper la mâchoire et certaines parties du corps dans des périodes ou je suis anxieuse mais j'ai appris à mieux gérer tout ça, même si je ne serai plus jamais insouciante.
Je veux qu'on me traite normalement et je parle le moins possible de mon passé aux nouvelles personnes qui sont dans ma vie mais je m'en remets tout juste.

Courage si vous traversez quelque chose de semblable ou toute autre addiction, il faut chercher la lumière dans cette merde mais ON PEUT S'EN SORTIR.

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