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Consommation excessive ?

Par Benyrion

Bonjour,

Je m’appelle Ben, j’ai vingt-quatre ans et je suis alcoolique. Bonjour Ben.
C’est comme ça qu’on fait, non? Je plaisante bien sûr happy

Je poste ce message aujourd’hui comme une bouteille à la mer, parce que j’ai une cuite. Encore une. J’ai décidé de me livrer sur mon parcours de manière objective et honnête. Parce que je veux que les choses changent.

Ma rencontre avec l’alcool s’est fait très tôt, aux alentours de mes douze ou treize ans, première grosse cuite à quatorze. C’était amusant, avec ma bande d’amis on avait l’impression de faire quelque chose d’interdit à chaque fois qu’on sifflait une chope. C’était la fête presque chaque week-end. Ça a continué jusqu’aux études supérieures où je me suis installé dans un petit appartement dans le centre d’une ville estudiantine réputée festive. Là encore j’ai fêté. Beaucoup. Trop. Vers la fin de ma deuxième année, en plein décrochage scolaire, j’ai commencé à me dire que ma consommation était tout de même excessive, réflexion que je n’avais jusqu’alors jamais eue. Pour être tout à fait honnête, c’était plutôt une fierté d’être un oiseau de nuit, de boire à outrance, fumer clope sur clope, j’avais clairement l’impression d’être plus à l’attention du monde qui m’entourait, de faire partie d’une sorte d’élite intellectuelle qui « comprenait » les choses plus que la moyenne des gens. Je ne sais pas si ce narcissisme exacerbé résulte de l’alcool, mais je suis convaincu que la boisson a joué un rôle. À côté de ça, j’aimais bien que les regards se posent sur moi, d’être la source d’amusement de mes amis en étant ivre. Bref, j’aimais boire et j’étais convaincu que l’alcool me faisait vivre des moments uniques, irremplaçables, voir surréalistes. Sauf qu’il faut se rendre à l’évidence: une fois les effets de l’alcool dissipé et la fête terminée, tout le monde oublie et retourne à son train-train quotidien. Mais moi je n’avais pas envie que la fête s’arrête.

Il y a deux ans, j’ai emménagé avec mon compagnon, plus ou moins loin de mes proches. Au début ça se passait, nouvel appart, nouveau job, etc. Sauf que je n’ai jamais vraiment arrêté de me mettre des mines monumentales, pire même: isolé de mes amis, j’ai commencé à boire seul. L’alcool a commencé à s’immiscer dans ma vie sans que je ne m’en rende vraiment compte. Le problème ce n’est pas de boire un verre, c’est de ne pas savoir s’arrêter. Une fois que je commence à boire j’ai du mal à mettre un stop. Un exemple parlant: je termine une journée de travail et on décide de boire quelques verres avec mes collègues. Au bout d’un moment chacun décide de rentrer, moi y compris sauf qu’une fois rentré je continue sur ma lancée et je bois seul, parfois toute la nuit et je finis par m’endormir au petit jour complètement cartouché. Je ne bois évidemment pas tous les jours mais quand je décide de le faire, je consomme de manière excessive. En prenant de l’âge, mes amis ont commencé à me faire des remarques sur ma manière de boire et tous s’accordent à dire que j’ai un « petit » problème d’alcool.

Ce qui est paradoxal, c’est que personne n’est vraiment disposé à m’aider. Ces mêmes personnes qui critiquent ma manière de boire sont également les premières à me servir volontiers une bière. J’ai remarqué également que j’essayais de me justifier sur ma consommation même quand personne ne me faisait de remarque à ce sujet, comme si j’étais coupable. Et oui, je culpabilise.

Je culpabilise d’autant plus qu’après une brève conversation avec mon compagnon, il m’a expliqué que ma consommation d’alcool commençait sérieusement à lui poser problème.

J’ai envie d’arrêter de boire. Mais ça me fait peur. C’est bête mais l’alcool occupe une telle place, à la manière d’un hobby, que je ne sais pas ce que je ferais du temps gagné à ne pas boire. Parallèlement je bois peut-être parce que je m’ennuie? C’est carrément horrible de dire ça, mais je suis arrivé à un stade où je n’ai pas peur de regarder la vérité en face. C’est certainement le moment pour ne pas glisser davantage sur la pente descendante sur laquelle je me trouve.

Je ne sais pas si je cherche des conseils, ou pas. Je reste preneur. J’avais simplement envie de décharger ces mots quelque part pour qu’ils puissent être lus sérieusement. Merci.

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5 réponses


Profil supprimé - 21/05/2020 à 12h16

Bonjour Ben,

Je me reconnais complètement dans ce que tu décris. Je suis un peu plus âgée et j'aurais aimé comme toi me rendre compte de ça plus jeune... En même temps à 24 ans, je crois que j'en étais encore au stade où l'alcool était juste festif.
Comme toi, j'ai dérivé dans l'alcoolisme solitaire, en revenant du bar, ou après un apéro avec mon compagnon... Car comme toi, impossible de m'arrêter jusqu'à ce que je sois en mesure de trouver le sommeil.
Je viens seulement d'admettre que je suis alcoolique, après toutes ces années. Car ne pas savoir s'arrêter et boire seule.e pour assouvir sa soif, au détriment de sa vie personnelle, il faut appeler un chat un chat, ce n'est pas normal et c'est une maladie qui a un nom.
Je ne suis pas une spécialiste mais je ne peux que te conseiller de te demander ce qui te pousse à faire cela... Et sans tomber dans quelque chose de trop psy, tu peux aussi comme j'ai fait discuter avec une personne sur le chat de ce site, ce qui m'a incitée à prendre au CSAPA de ma ville, j'ai rendez-vous la semaine prochaine...
En parler avec des professionnels qui ne jugent pas c'est déjà reprendre le contrôle de sa vie je trouve.
Et tu n'es pas seul, loin de là.
Bonne journée !

Profil supprimé - 06/06/2020 à 20h19

Bonsoir Ben,
Je suis touchée par ton témoignage. Je pense que si tu en arrives à parler c’est que tu reconnais le problème. Le conseil que j’ai envie de te donner tu es très jeune et peut être fais toi aider par un médecin, un addictilogue. Sans vouloir te faire peur j’ai tout perdu à cause de l’alcool. Alors vraiment un conseil, si tu sens que tu n’arrives pas à gérer les choses seul. Fais toi aider au plus vite.

Lili 50 - 07/06/2020 à 10h38

Bonjour Ben,
Moi aussi je me retrouve dans ton témoignage. J'ai 40 ans et j'ai commencé à boire vers 17 ans. Au début c'etait avec mes amis, en soirée jusqu'à finir la tête dans les toilettes. Vers 25 ans j'ai commencé à boire seule. J'ai pris rdv avec mon médecin traitant il y a 7 ans parce que je me suis rendue compte que ma consommation était problématique. (accident de voiture, chute sur la tête nécessitant des points...) Et surtoit la honte que ça engendre. L'impression que tout le monde est au courant, raser les murs pour pas se faire remarquer.
Il m'a donné un traitement et un suivi psy. J'ai décidé de tout arrêter il y a qq mois et de gérer seule. Mais c'est très dur et j'ai rechuté cette semaine. Je me sens très faible et honteuse.
Pourtant je peux rester sobre des mois entiers. Et qu'est ce suis productive dans ces cas là !! N'ai pas peur d'arrêter de boire, et surtout pour ne pas glisser d'avantage comme tu dis.
Ça n'ira sûrement pas en s'arrangeant si tu continues comme ça. L'alcool fait du mal, il peut pousser à la mort accidentelle ou intentionnell. C'est un poison.
Merci de m'avoir lu, courage à toi

Benyrion - 08/06/2020 à 22h35

Bonjour !

Je commencerai déjà par vous remercier toutes les trois d’avoir pris le temps de vous attarder sur ce fil !

Ca me fait du bien de savoir que je ne suis pas seul, mais dans un autre sens ça me fait un peu flipper aussi.

Le fait d’avoir fait un premier pas en publiant mon premier message m’a poussé à en parler librement avec mes proches qui, fort heureusement, ne sont pas du genre à juger, au contraire, ils sont plutôt à l’écoute. Ils savent me recadrer quand c’est nécessaire, c’est tantôt utile, tantôt ça me donne encore plus l’impression d’être un irresponsable qu’on doit tenir par la main. J’ai peur que ma consommation excessive les pèse un jour et qu’ils m’envoient balader, d’autant plus que’on ne va pas se mentir, le fait de leur en parler spontanément ne m’a pas empêcher de m’eniver non plus… Même s’ils restent de bons conseils, ils ont parfois des mots durs et sont d’avis de dire que chacun est responsable de sa consommation. Idem pour ma mère qui m’assène souvent des « Tu n’as qu’à moins boire » ou des « Ben oui, je vois que tu as encore bu », ce qui débouche souvent sur des échanges où tout le monde est un peu sur la défensive. C’est compliqué de leur faire comprendre que ce n’est pas si simple, et lorsque j’annonce que je décide de ne pas boire ou de freiner ma consommation, ils n’y croient pas vraiment. Je ne les blâme pas pour ça, car je leur donne raison en continuant à me murger. Je prends pour vérité qu’on est seuls et qu’il ne faut pas compter sur les autres pour se tirer vers le haut. A mes yeux, être entouré ne fait pas tout, c’est à moi de leur prouver que j’ai de la volonté, et jusqu’à récemment, j’en manquais cruellement.

Ma prise de conscience à propos de ma consommation vient également énormément du fait que j’ai des lendemains de soirée assez violents. J’enchaîne les crises de spasmophilie, il m’arrive de passer la totalité de la journée au fond de la couette car je suis incapable de me lever, j’ai la gorge nouée, j’angoisse, j’ai des apnées, impossible d’avaler quoi que ce soit, des bouffées de chaleur, bref vous voyez le style, je pense qui si on est tous ici aujourd'hui c’est qu’on connaît plus que bien les symptômes des gueules de bois violentes et récurentes... mais ce qui est vraiment problématique c’est qu’en plus de devoir affronter toutes les étapes « physiques » du lendemain s’ajoute le fait que je me sente vraiment minable, sentiment encore plus accentué lorsque j’ai passé une soirée arrosée avec des collègues ou des personnes qui ne me connaisse pas vraiment et devant lesquels j’étais dans un état lamentable. L’alcool me désinhibe à tel point que toutes les vannes s’ouvrent et que je n’ai plus aucun filtre, de sorte à ce que je parle dans des situations où il serait préférable que je me taise, bref, je m’épanche de manière excessive et je me sens encore plus honteux et coupable quand je ne m’en souviens que par bribes et que je sais que j’ai dépassé certaines limites.

Je me reconnais également dans vos témoignages. Notamment celui de Lili, dans la mesure où j’ai également été blessé à cause de l’alcool (dévalé les escaliers, micros pertes de conscience à deux reprises, …). L’interne de mon médecin généraliste m’avait d’ailleurs alerté sur le fait que consommer de l’alcool au point d’en arriver à en être blessé était préoccupant. A l’époque, je lui avais ris au nez et j’avais même été vexé par ses propos. De même, il m’arrive de connaître, comme toi, des périodes plus ou moins longues sans boire mais une fois que je suis dans un contexte qui se prête à la boisson, la situation m’échappe rapidement.

Savoir en parler et reconnaîter son problème de boisson est une étape complexe à expliquer. J’ai du mal à discerner quand les choses ont dérapé, j’imagine qu’il s’agit d’un processus lent et vicieux. Je pense que là c’est là une de mes plus grosses préoccupations sur l’alcoolisme : l’a-t-on toujours été, est-ce qu’on le devient ? Qu’est-ce qui différencie plusieurs grosses cuites d’un réel problème d’alcool, etc… Quand j’en ai le courage, je cherche des éléménts de réponses et je me documente sur le sujet. C’est paradoxal, parce que je me demande si je cherche à réellement me documenter ou si je cherche à me rassurer en me disant qu’il y a toujours pire que soi.

Bref, l’alcool, j’y pense souvent. C’est tellement omniprésent dans le quotidien et les facteurs d’influence extérieurs sont tellement nombreux qu’il m’est déjà parfois arrivé à me réjouir de trouver une occasion de boire un verre. Et quand il n’y a en pas, je la créée. Encore une fois, j’y décèle un manque de volonté et, comme disait Lili, une certaine forme de faiblesse.

Je ne sais pas si je suis encore prêt à sauter le pas et prendre un rendez-vous chez un addictologue dans l’immédiat… Comme vous me l’avez conseillé, commencer par échanger via le chat serait déjà une bonne piste pour répondre à quelques questionnements. J’ai envie d’essayer d’une ultime tentative pour reprendre le contrôle « seul », me confronter à moi-même en me testant, voir si je peux passer une soirée avec des amis en consommant raisonnablement, voir pas du tout. Là aussi se pose une nouvelle question : réduire ou arrêter radicalement ? La crainte que je nourris si je décide de réduire serait le fameux « chasser le naturel et il revient au galop » et de l’autre côté, arrêter radicalement me paraît insurmontable, j’ignore si être dans un contrôle permanent m’épanouirait. Pour ce deuxième cas, j’imagine qu’il suffit d’essayer. Quoi qu’il en soit, j’ai décidé de faire un break, me recentrer sur moi-même en me replongeant des d’anciens loisirs que je n’avais plus : la littérature, pour commencer. J’ai plusieurs fois envisagé de rejoindre une troupe de théâtre amateur, et je me suis mis au sport et réduit le tabagisme. Et puis, avec le déconfinement, je retourne bientôt sur le chemin du travail et j’espère qu’être occupé m’aidera à chasser ces envies de « rechute », si on peut les appeler comme ça.

Je terminerais ici, en vous remerciant une fois de plus pour vos réactions. C’est déjà une chose précieuse que celle de partager sérieusement et sans jugement. J’espère de tout cœur que vous trouverez la manière la plus adéquate pour vous éloigner du fléau des dérives des consommations excessives. Ce ne sont que des mots et je réalise que trouver la force et la volonté nécessaires pour prendre ses distances avec l’alcool est un combat difficile, de par mon expérience et vos témoignages. Je vous envoie tout mon soutien.

Amicalement,
Ben

Zozo94 - 13/06/2020 à 02h27

Salut Ben,

Je me permets de te répondre car je me suis reconnue dans ton témoignage. J'ai moi aussi 24 ans. J'ai réalisé mon addiction autour de mes 20-21 ans, donc assez jeune, car j'étais déjà sensibilisée au problème (un parent alcoolique) et que ma mère a su tirer la sonnette d'alarme à temps.

Je trouve ton message très spontané et honnête, du coup le fait de regarder les choses en face à ce point c'est déjà une bonne partie du travail qui est fait, sur le fait de savoir et d'analyser si tu as réellement une addiction à l'alcool, et si oui comment faire.
La question de l'addiction, toi et toi seul peut en trouver la réponse, avec peut être une aide médicale, et les témoignages de personnes qui sont sujettes à ce problème. Dans tous les cas, tu te poses les bonnes questions et tu mets le doigts sur des choses qui doivent t'alerter : le fait de ne pas pouvoir t'arrêter, de consommer seul, les pertes de contrôle de soi, les lendemains désastreux, la culpabilité, la honte etc. Ce sont des choses qui sont familières à chaque participant de ce forum.

Si j'avais un conseil à te donner, c'est d'en parler à quelqu'un d'extérieur, donc comme tu l'as évoqué soit sur le chat, ici sur le forum et aussi encore mieux à un professionnel de santé.
Personnellement, je m'étais tournée vers mon médecin généraliste qui a su m'écouter et me diriger vers un service d'addictologie pour jeunes dans ma région. Je suis toujours suivie actuellement et crois moi c'est un extraordinaire garde fou, conseiller, psy etc.
Seul, il est possible d'y arriver, mais je pense que c'est plus difficile. J'ai tout essayé, pendant longtemps : réduire (ça ne dure qu'un temps), ou arrêter sans être suivi c'était très difficile pour moi.

Pour répondre à tes questions, s'il s'avere que tu as une addiction à l'alcool, réduire peut être une solution un temps mais, à moins d'être assidûment suivi, il faut tu constateras peut être que c'est très difficile et tu auras peut être un sentiment d'échec au final. C'est ce que j'ai vécu.
Pour moi l'abstinence est la solution, ca fait presque 4 mois, et ca peut paraître radical, mais je préfère être radicale dans ce sens que dans l'autre !

Concernant l'entourage, ça a l'air de te tenir à cœur et c'est bien normal. Je te conseille d'évoquer ton problème à des personnes de ton entourage très proche, dont tu es sûr qu'ils souhaitent ton bien et qui tiennent à toi. Je ne connais que trop les relations faussées par l'alcool, les fameux potes de soirée avec qui on se détruit plus qu'autre chose, et qui ne sont pas vraiment des oreilles attentives.
Dans mon entourage actuel, seules deux personnes sont au courant de mon addiction : ma mère et mon ex copine. Je suis partie du principe que ca ne regardait personne d'autre et lorsque j'ai arrêté de consommer, par exemple en famille, finalement on ne m'a pas trop embêtée avec ça. Tu verras bien au fil du temps les réactions de ton entourage. Mais ceux à qui tu te confies et qui tiennent à toi t'encourageront et ne douteront pas de toi, peu importe ta décision.

En fin de comptes dis toi que, même si ça te paraît impossible dit comme ça, tu es capable de faire une croix sur l'alcool si tu le souhaites. En tout cas tu as déjà fait le plus gros du travail en regardant les choses en face donc félicitations.

Si tu as des questions n'hésite pas.

Très bonne soirée

Zz

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