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bluenaranja - 04/01/2012 22:56:35

Bonjour modérateur !

J'ai lu votre question il y a un moment déjà, mais j'ai pris le temps de réfléchir un peu.
Mon expérience date, puisque cela remonte de 13 à 20 ans.

Le truc qui m'a vraiment marquée aux Usa, alors que vraiment j'étais dans un hôpital public tout pourri, c'est que la moitié des soignants avait eu une expérience de la drogue, de la prostitution ou de l'alcool, ça, c'était génial. Mais vraiment. Cela ne remplace pas un bon psy, mais qu'est-ce ça m'a manqué en france.

Parce que finalement, ce sont eux qui passent le plus de temps avec nous, eux qui sont là la nuit pendant les insomnies.
Entendre la parole de celui qui est passé par là, et avoir constamment la preuve vivante qu'on peut s'en sortir, et super bien, ça, c'était énorme.
Et d'être entre addicts. Alcoolique, drogue, médicaments, jeu.

Pas comme en France où les toxs étant réputés chiants, ingérables, manipulateurs, et j'en passe et des meilleurs, ils pensaient qu'il ne fallait surtout pas les mettre ensemble. Plus de toxs égal plus d'emmerdes.

Au début, il y a 20 ans, ils dispatchaient un, deux toxs maxi par pavillon fermé. Je suis incollable sur les pathologies mentales, j'ai vu des gens partir/revenir d'électrochocs, des gens en crise,une femme qui était là, à errer dans les couloirs, depuis quarante ans !!! etc... Je passe les détails pour les âmes sensibles.

Puis un centre tox a ouvert et ils ont eu une dizaine de lits - c'est à dire un demi-pavillon, où ils ont évité de mettre les pathologies les plus lourdes.
C'était déjà un pas de géant ! Il y avait quand même un type qui était là depuis 20 ans !! Donc euh une vraie pathologie... Son truc, c'était de s'approcher des toxs en manque en demandant :" Ca va pas, t'es pas bien ?"
et quand le nouveau répondait que non, le type faisait un grand sourir "Ah, ben c'est bien fait !" Et il se barrait.

Sur toute l'équipe, deux soignants faisaient des stages spécial toxs et étaient à l'écoute, le reste nous faisaient bien sentir qu'on était toxs, qu'ils ne nous aimaient pas, qu'il fallait leur parler le moins possible. Eux étaient là pour faire des piqures et s'occuper des médicaments, par perdre du temps à parler avec des toxs.

Sincèrement, le seul truc positif que cet hp m'a apporté, c'est des portes bien solides entre moi et la came, et surtout, quelque soit l'heure et l'état dans lequel je me pointais, il y avait toujours un lit pour moi.

Mais le mépris et la manière dont certains nous traitaient !! Du coup, on le leur rendait bien. En même temps, ça nous occupait, on avait que ça à foutre, écouter la radio ou regarder la Tv, et à huit heures, le tintements des verres et le cri " Mééédicaments" - je l'entends encore - et le bruit des chaussons, la marche des zombies.

D'autre part, il y a le problème de rentrer de la came - perso, je l'ai jamais fait, si je voulais de la came, je signais une décharge et je sortais, mais j'ai rentré plusieurs fois du hasch.
Alors que j'étais enceinte, en train de me sevrer du sub et de la came, une copine à moi, que je connaissais à l'extérieur, a rentré de la came. Elle était tellement défoncée, ils ont bien sûr capté ce qui se passait.
Et là, convoquée par le psy, qui me dit voilà, l'équipe, on est pas d'accord, toi, tu veux quoi, qu'elle reste ou qu'elle sorte ?
Moi, j'ai juste pensé à mon bb que je devais protéger et à comment c'était dur avec elle à côté, et j'ai dit qu'elle sorte.
Ils m'ont dit ok, elle sort.

Mais putain c'était pas à moi de prendre cette décision !! Et si elle était morte d'une od trois jours plus tard hein ? !!

Je suis allée la voir pour lui dire et lui expliquer - c'était une copine, elle a compris. Elle est morte six mois plus tard, anorexique et tox, mauvais mélange.
Mais bien sûr que je me suis demandé, et si ? On sait trop bien que la vie ne tient parfois qu'à un fil.

Pareil, dans ce pavillon, il n'y avait rien à faire.
Enfermé toute la journée, pas de jardin, deux heures dans la salle de sport par semaine - quand il y avait une place !!
Bouffer, fumer des clopes et parler de came entre nous. Et voir le psy une demi-heure tous les deux jours.

Aux states il y avait une séance le matin et une l'aprèm, entre cocaine anonymes, narco anonymes, alco anonymes, etc... Plus des exercices thérapeutiques avec le psy - écrire, jouer des situations, parler. Ils n'avaient pas de moyens - c'était des dortoirs - mais vachement plus de motivation !!

Avant d'avoir mon bébé, quand j'allais à l'hp, c'est que ça allait tellement mal que c'était ça ou crever.

Je suis sûre qu'il y a encore des endroits où ça se passe comme ça, alors... Débattre sur la mixité ou non, c'est un peu se demander si quelqu'un qui meurt de soif préfère de la menthe ou de la grenadine avec son eau.
C'est de sous, de locaux, de formations, d'intervenants dont il y a besoin !!

Alors c'est vrai que de la mixité surgissent des flirts, des positionnements de 'mâle", etc.. Qui peuvent faire perdre de vue l'objectif premier.
Des gens sortent avec d'autres, il y a du tripotage dans les chambres, mais plus parce qu'il n'y a pas grand chose d'autre à faire je dirais. Et qu'au bout d'un moment, quand le corps et l'esprit vont mieux, automatiquement, l'Eros ressurgit.
A la limite, c'est une bonne nouvelle. Un comportement "normal", "socialement adapté"

A la limite, redécouvrir la sexualité et la drague sans came, c'est pas plus mal ! Parce que quand on a pas fait l'amour depuis des années sans être complètement défoncé, ben, ça change.

Et de toutes façons, à partir du moment où il y a groupe, il y a effet de groupe, et des gens qui se posent en leader, d'autres en fouteurs de merde, d'autres en je-fais-que-passer.
Mais pareil, c'est peut être pas plus mal. Quand on est tox, c'est moi et la came.
Alors c'est réapprendre un peu le monde avant d'y replonger.

Je pense pas que mixité ou pas change quoi que ce soit.
Il y a tellement de choses plus importantes à faire avant !

Une femme peut être aussi violente qu'un homme, un homme plus romantique qu'une femme, les deux peuvent se prostituer, etc...

Alors oui, dans l'absolu, il faudrait faire du cas par cas, pas de questions de sexe, mais question de vécu, on n'arrive pas à la came par les mêmes chemins.
Il faudrait plus d'intervenants, de la méditation, de l'art thérapie, des ateliers, et que chacun puisse choisir ce qui lui convient le mieux.
Il faudrait des assistantes sociales pour commencer à reprendre pied dans la vie avant même de sortir de l'hôpital.
La plupart des toxs ont des problèmes annexes qui leur sautent à la gorge à peine sortis de l'hôpital.

Il faudrait pas seulement arrêter la came mais rallumer l'espoir.

Finalement, c'est exactement comme si à l'époque j'arrivais avec les deux yeux au beurre noir à chaque fois. On me soignait les yeux, on m'expliquait ce qu'il fallait faire - vite fait hein - et on me renvoyait chez moi. Souvent à la rue.

Heureusement que j'avais une vraie thérapie en route à côté.
L'un dans l'autre, ce sont les deux, plus mon fils qui a rallumé l'espoir, qui m'ont fait changer.

Et aussi le fait qu'avoir un enfant m'a permis de toucher les allocs et d'avoir un appart à moi, au lieu d'être à la rue ou dans des foyers jeunes travailleurs glauquissimes quand j'arrivais à travailler.

Bonne journée
bluenaranja

Profil supprimé mercredi 04 janvier 2012 21:56:35